RACH 3 : L’OEIL DU TIGRE

Le 1er mouvement du 3ème Concerto pour piano de Rachmaninov (Rach 3), c’est une histoire à la Rocky. C’est l’histoire d’un outsider, d’un petit qui n’a aucune chance, et qui doit affronter un champion. LE champion toutes catégories : l’orchestre et ses 80 musiciens.

Un 1er mouvement à la manière d’un combat de boxe

Drôle d’idée que de comparer un mouvement de concerto à un combat ? Pas tant que ça ! Si l’on se réfère à notre cher Wikipédia, le concerto exprime entre autre l’idée d’un combat entre le soliste et l’orchestre.

Extrait de la page Wikipedia dédiée au concerto :

L’origine du terme contient deux courants parallèles et complémentaires de son histoire. Concertare qui englobe l’idée de rivaliser, de se quereller, de lutter notamment en paroles. Ce terme se différencie de conserere qui a une signification de lien, de jonction mais qui peut être aussi l’idée de mettre aux prises.

https://fr.wikipedia.org/wiki/Concerto

 

Un défi physique

Quand Rachmaninov achève en 1909 son 3ème Concerto, il le dédie à Josef Hofmann, réputé pour être le plus grand des pianistes. Comme le veut la coutume, Rachmaninov invita Hofmann à créer l’oeuvre, chose qu’il refusa (il ne jouera d’ailleurs jamais l’oeuvre en public).

Ce fut donc Rachmaninov qui créera l’oeuvre, chose qui, selon le New-York Herald, le laissera au bord de l’épuisement :

Extrait de la critique du New-York Herald :

« Monsieur Rachmaninov fut rappelé plusieurs fois par le public qui insista pour qu’il rejoue, mais il leva les mains dans un geste signifiant qu’il était d’accord pour rejouer mais que c’étaient ses doigts qui ne l’étaient pas. Cela fit beaucoup rire le public qui, à ce moment-là seulement, le laissa partir ! »

Source Wikipedia

LE COMBAT – Round 1 : Soliste vs Orchestre

Le 1er round dévoile un échange d’une grande violence dans lequel piano et orchestre font jeu égal. Pourtant l’orchestre va finir par prendre le dessus, dévoilant sa véritable puissance. Submergé, comme pris dans les cordes, le pianiste achèvera cette première manche comme titubant, au bord du KO.

Extrait du 1er mouvement du 3ème Concerto de Rachmaninov par Leif Ove Andsnes

Lorsque l’orchestre dévoile toute sa puissance, l’orchestre nous apparaît comme un monstre, tel une hydre à trois têtes. Le soliste ne peut rien faire. Il vient de se faire battre. Il titube.

 

Round 1 dans son intégralité.

 

LE COMBAT – Round 2 : Le combat intérieur

A la suite de cet échange, le soliste est laissé au bord du KO, titubant au milieu du ring. Cette séquence amènera la fameuse cadence, moment de pure virtuosité où le pianiste va se confronter à lui-même, dans un magnifique combat intérieur…. Round 2 !

La 2ème cadence extraite du 1er mouvement du Troisième Concerto de Rachmaninov

Dans cette cadence on retrouve cet élément caractéristique de la musique de Rachmaninov, avec cette dualité entre les graves et les aigus suggérant une sorte de folie schizophrène…. Le soliste doit ici démontrer toute sa virtuosité qui ne saurait se résumer qu’à une simple question de technique, mais qui devient un moyen d’expressivité.

 

 Par cette virtuosité, Rachmaninov nous fait entendre un paysage sonore grandiose, d’une beauté unique au sein de la littérature pianistique.

 

Le film Shine : L’histoire d’un KO ?

Le film Shine du réalisateur Scott Hicks avec Geoffrey Rush raconte l’histoire du pianiste prodige David Helfgoot . Figure centrale du film, le 3ème Concerto de Rachmaninov constitue un Everest à gravir et qui se résultera par une défaite par KO.

 

Epilogue

Comparer l’un des plus grands chefs-d’oeuvre de l’histoire de la musique à un film de boxe peut heurter. Cela serait faire fi des lois de l’harmonie qui par définition réunit, enchante, transfigure, exalte. Toutefois je crois que ce qui compte ici, c’est la portée métaphorique. Toute oeuvre d’art possède un potentiel d’imaginaire, et c’est de ces potentiels dont il est question ici.

Celui qui j’ai choisi de traiter ici est celui du rapport du piano à l’orchestre dans sa conception romantique, conception qui présente le piano dans une dimension orchestrale. J’en veux pour preuve les œuvres de Liszt, Busoni, ou encore Schumann pour ses Etudes Symphoniques, qui vont chercher à évoquer l’orchestre par le piano à travers ses couleurs, ses sonorités, son ambitus ainsi que ses dynamique.

 

Beethoven-Liszt : Extrait de la 9ème Symphonie par Cyprien Katsaris

 

Charles-Valentin Alkan : Extrait  du Concerto pour piano seul par John Ogdon

 

C’est donc un sujet central au sein de l’imaginaire romantique que cette appétence orchestrale du piano, thématique reprise par Rachmaninov et qu’il aborde, pour une partie du moins du 1er mouvement, sous le rapport de la dualité.

 

Bonus scene

Petit plaisir coupable 😉

 


 

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A bientôt 😉

Jürgen

 

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